Si recharger un véhicule électrique est aussi simple que de brancher un câble dans une prise, les fortes puissances atteintes pour recharger un véhicule électrique nécessitent tout de même de prendre des précautions, que ce soit pour éviter un accident corporel (électrocution) ou matériel (incendie).
Courant alternatif et courant continu
Le courant alternatif est le type de courant communément utilisé dans la production d'électricité (centrale nucléaire, centrale au gaz, centrale hydroélectrique, usine marémotrice, éolienne) sauf lorsque l'électricité est générée par des panneaux solaires (dans ce cas, il s'agit d'un courant continu). D'autre part, le transport d'électricité se fait aussi en courant alternatif à quelques exceptions près (câbles sous-marin par exemple).
Les habitations sont généralement alimentées en courant alternatif monophasé d'une tension de 230 V.
La batterie d'un véhicule électrique fonctionne en courant continu tandis que le moteur fonctionne avec un courant alternatif triphasé. Aussi, lorsque le courant qui sert à recharger la batterie est alternatif, le courant est transformé (redressé) par le chargeur embarqué dans le véhicule pour alimenter la batterie en courant continu.
Plus l'intensité du courant admissible par le chargeur est élevée (ce qui permet de recharger plus vite le véhicule), plus ce dernier est volumineux, lourd et coûteux. Il en va de même lorsque le chargeur embarqué prend en charge un courant alternatif triphasé plutôt qu'un courant alternatif monophasé.
Modes de chargement
Pour recharger un véhicule électrique, il existe 3 modes de charge :
- mode 2 : recharge sur une prise domestique (type E) classique dédiée ou non
- mode 3 : recharge en courant alternatif sur une borne fixe
- mode 4 : charge rapide en courant continu
Dans le cas d'une recharge en mode 2, le véhicule est branché sur une prise classique mais le câble est obligatoirement équipé d'un dispositif de protection pour contrôler le bon déroulement de la charge. Le chargeur embarqué assure la conversion du courant alternatif vers un courant continu pour alimenter la batterie. La puissance ne peut pas excéder 3,7 kW.
Pour une recharge en mode 3, l'ensemble de la chaîne de distribution d'électricité a été optimisée pour la recharge d'un véhicule électrique, c'est-à-dire pour fournir une intensité élevée pendant plusieurs heures : le véhicule est branché à une borne de recharge (à domicile ou sur le domaine public) soit à l'aide d'un câble intégré au point de charge, soit à l'aide d'une prise de type 2 côté borne. Le courant fourni au véhicule est de type alternatif et le chargeur embarqué dans le véhicule a la charge de convertir le courant en courant continu. Lorsque le véhicule est alimenté en courant alternatif monophasé, la puissance de charge peut atteindre 7,4 kW et 22 kW lorsqu'il est alimenté en courant alternatif triphasé.
Dans le cas d'une recharge en mode 4, la conversion du courant alternatif vers un courant continu est effectuée au niveau du point de charge. Le véhicule est donc alimenté directement en courant continu et le chargeur embarqué n'est plus en fonction. Ce mode permet d'atteindre des puissances de recharge plus élevées et est particulièrement adapté aux longs trajets.
Note : il existe un mode 1, très similaire au mode 2, à l'exception du fait que le câble électrique d'alimentation n'est pas équipé de boîtier de contrôle. Ce type de charge est réservé exclusivement à la recharge de batteries de plus faible capacité (vélos à assistance électrique par exemple).
Dispositif de protection intégré au câble (mode 2)
Dans le cas d'une recharge en mode 2 (branchement sur une prise classique), le câble entre la prise et le véhicule doit être équipé d'un dispositif de protection ICCB (In Cable Control Box).
Ce dispositif a pour fonction de :
- protéger l'utilisateur contre les chocs électriques en stoppant le processus de charge dès qu'une anomalie de courant est détectée
- protéger le véhicule contre les courts-circuits
- protéger le véhicule des surtensions
Si ce dispositif est sûr pour l'utilisateur comme pour le véhicule, le système n'a pas la mainmise, en revanche, sur l'installation électrique en amont (différentiel, prise de courant et câblage depuis le compteur jusqu'à la prise). Il existe donc un risque d'accident (incendie en particulier) :
- si le différentiel au niveau du compteur n'est pas adapté
- si les câbles entre le disjoncteur différentiel ne sont pas d'une section suffisante pour supporter une puissance élevée pendant plusieurs heures
- si les contacts de la prise sont endommagés ou si les câbles sont mal fixés à la prise
Les dispositifs de protection les plus évolués peuvent disposer de fonctions supplémentaires telles que :
- protection contre la surchauffe en intégrant un capteur de température dans le boîtier de contrôle et/ou un capteur de température au niveau de la prise de courant.
- Intensité de recharge ajustable au niveau du boîtier
- Reprise automatique de la recharge après une anomalie
Types de prises côté véhicule
En Europe, les prises de type 2 sont les plus répandues pour les recharges effectuées en courant alternatif (monophasé ou triphasé) ainsi que les connecteurs de type combo CCS pour les recharges rapides en courant continu.
Avant de converger vers ces 2 connecteurs, plusieurs types de prise ont équipé les véhicules électriques tels le type 1 ou le type 3. Enfin, le standard CHAdeMO a été développé par une collaboration entre plusieurs acteurs du véhicule électrique japonais tels que Honda, Mitsubishi, Nissan, Subaru et Toyota. Toutefois, ce standard est amené à disparaître progressivement en Europe.
Rares sont les véhicules neufs encore pourvus d'une prise CHAdeMO en Europe : il ne subsiste que la Lexus UX 300e, la Nissan Leaf et le Mitsubihi Outlander PHEV. A contrario, pour la Honda e, le constructeur a fait le choix de commercialiser la citadine avec une prise Combo CCS en Europe et une prise CHAdeMO au Japon (où ce format de prise est très populaire).
A l'origine, les prises de type 2 sont conçues pour alimenter le véhicule aussi bien en courant alternatif qu'en courant continu : la puissance peut atteindre, en théorie, 70 kW en courant continu. Toutefois, cette possibilité n'est désormais plus prévue par les standards européens qui imposent désormais une prise de type combo CCS pour la recharge en courant continu.
Seules les Tesla Model S et X font exception puisqu'elles rechargent en courant continu avec un connecteur de type 2 en Europe sur le réseau de superchargeurs (de 2ème génération) jusqu'à une puissance de 120 kW (seuls ces 2 modèles sont compatibles avec ce connecteur avec le concours d'un détrompeur). Sur les bornes autres que celles du constructeur américain et sur les superchargeurs de 3ème génération, il est nécessaire d'utiliser un adaptateur combo CCS pour les recharges en courant continu.
Connecteurs des prises de type 2 et combo CCS
Les prises de type 2 comportent 7 orifices :
- signal de proximité (PP)
- signal de contrôle (CP)
- Mise à la terre (PE)
- phase neutre (N)
- 3 phases (L1, L2, L3). Dans le cas où le courant d'entrée est monophasé, seule la première phase est utilisée
Les prises combo CCS (Combined Charging System) ont, quant à elles, 5 orifices :
- signal de proximité (PP)
- signal de contrôle (CP)
- Mise à la terre (PE)
- Borne positive (+)
- Borne négative (-)
Le signal de proximité (PP) consiste en une résistance entre le connecteur PP et la mise à la terre. En fonction de la valeur de cette résistance, le dispositif de charge connait l'ampérage maximum accepté par le câble.
Le signal de contrôle assure la communication entre l'infrastructure de recharge et le véhicule. Quand le câble est connecté à l'infrastructure et au véhicule, la borne envoie un signal au véhicule pour l'informer de l'intensité maximale que la borne peut fournir (en tenant compte de la capacité du câble).
Lorsque le véhicule reçoit ce signal, il envoit, en retour, un autre signal pour indiquer quelle est l'intensité dont a besoin le véhicule (en fonction du niveau de charge de la batterie et de la température, entre autres) puis le véhicule envoie un deuxième signal pour indiquer à la borne que la charge peut débuter.
D'autre part, une tige métallique venant se loger dans l'ergot de sécurité permet d'éviter le débranchement accidentel des prises côté borne et côté véhicule. Le verrou ne peut être désactivé que par le conducteur lorsqu'il termine la charge. Il s'agit donc d'une sécurité contre les chocs électriques, mais aussi une protection antivol du câble.
Enfin, si le verrou mécanique est inactif côté borne, il existe une seconde sécurité en cas de débranchement accidentel du côté de la prise mâle (branchée à la borne) : le connecteur du signal de contrôle CP est 10 mm plus court. Si la prise est débranchée accidentellement alors que du courant circule toujours à travers le câble, le connecteur CP perd le contact en premier, ce qui a pour effet de couper immédiatement le courant sans risque de générer un arc électrique.
Recharge à domicile
Lorsque le véhicule est rechargé sur une prise de courant classique de type E (mode 2), l'intensité ne doit pas dépasser 8 A (1,8 kW). Cette limitation a 8 A permet de limiter les risques de surchauffe au niveau de la prise de courant à cause d'un mauvais contact.
En effet, les prises de courant ne sont pas conçues pour supporter des charges importantes pendant de longues heures (le risque n'est d'ailleurs pas spécifique aux véhicules électriques, les chauffages d'appoint, grands consommateurs d'énergie sur des périodes longues et dont la puissance peut dépasser 2.000 W, peuvent être problématiques en cas de mauvais contact).
D'autre part, les contacts des prises utilisées pour la recharge des véhicules électriques sont susceptibles de se dégrader plus rapidement en raison des branchements/débranchements fréquents, ce qui augmente d'autant plus le risque de mauvais contact au niveau de la prise.
Note : il est couramment admis qu'une prise de courant peut supporter une intensité de 16 A sur un court laps de temps (de l'ordre de quelques minutes) et 10 A en continu (1 à 2 heures). Dans le cas des véhicules électriques dont la charge est amenée à durer plusieurs heures, le législateur a fixé la limite à 8 A.
L'utilisation de prises dédiées de type E (Legrand Green'up ou Hager Witty) permet d'augmenter l'intensité jusqu'à 16 A (3,7 kW) : ces prises sont conçues spécialement pour la recharge des véhicules électriques. A cet effet, les contacts de la prise reçoivent un traitement de surface pour améliorer la conductivité électrique et de limiter la dégradation de la prise au fil du temps. D'autre part, les prises dédiées doivent systématiquement être reliées à un interrupteur différentiel de type A, B ou F, plus sensibles aux différentes anomalies possibles du courant.
Un système de détection (un aimant présent dans la prise de courant) permet aux câbles de recharge compatibles de faire automatiquement la différence entre une prise dédiée ou non. Lorsque le dispositif intégré au câble ICCB détecte que la prise de courant est une prise dédiée, il fixe l'intensité maximale de recharge à 16 A (3,7 kW). Le cas contraire, il limite l'intensité à 8A (1,8 kW).
Pour les besoin de charge plus conséquents, une borne de recharge (wallbox) est envisageable : il s'agit d'une recharge en mode 3. Les bornes de recharge à domicile permettent de recharger jusqu'à une puissance de 7,4 kW (courant alternatif monophasé 32 A) ou 22 kW (courant alternatif triphasé 32 A). Dans le cas où de nombreux consommateurs électriques sont utilisés simultanément et la puissance électrique demandée est importante, la wallbox permet de faire du délestage en réduisant l'intensité et éviter de faire disjoncter son installation.
D'autre part, les bornes de recharge peuvent offrir des fonctions supplémentaires par rapport à une prise classique :
- Démarrage différé de la charge
- Fonctions connectées
- Suivi de la consommation électrique
- Déclenchement de la charge par identification
Au quotidien, il n'est pas indispensable de charger la batterie jusqu'à 100%, 80% ou 90% suffisent. Limiter le niveau de charge permet de préserver au mieux la durée de vie des cellules.
Occasionnellement, charger jusqu'à 100% est utile pour équilibrer la charge entre toutes les cellules et étalonner l'algorithme de mesure du niveau de charge de la batterie. Enfin, charger à 100% est aussi profitable en prévision d'un long trajet pour maximiser son autonomie au départ.
Recharge sur une borne publique
La recharge sur une borne publique se fait soit en utilisant le connecteur de type 2 (recharge normale en courant alternatif) ou le connecteur combo CCS (recharge rapide en courant continu). En l'absence de réglementation européenne, il existe une multitude de moyens de paiement, de facturation et de tarifs.
Les moyens de paiements peuvent être :
- un badge RFID
- une carte bancaire
- l'identification du numéro de série du véhicule par la borne lors du branchement
La facturation peut se faire :
- à la minute
- par kilowatt.heure (kWh) rechargé
- une combinaison des 2
Afin de minimiser le temps de charge sur une borne publique, il est conseillé de :
- ne pas recharger le véhicule lorsque le niveau de la batterie est supérieur à 30 % pour bénéficier des puissances de charge les plus élévées
- Stopper la charge au-delà de 80 % car la puissance électrique devient faible
- procéder au conditionnement de la batterie avant de commencer la charge afin de bénéficier d'une puissance de charge élevée dès les premières secondes. Cette fonction est, sur la plupart des véhicules électriques, activée dès lors que le conducteur utilise son système de navigation et que les arrêts-recharge sont programmés. Il faut aussi, en règle générale, que le niveau de charge de la batterie soit supérieur à 5%
La puissance de charge maximale acceptable par le véhicule et sa batterie ne fournit pas nécessairement une bonne indication du temps de charge car, notamment lorsque la puissance est très élevée, la puissance maximale n'est atteinte que sur un laps de temps limité. Dès lors, il est plus parlant de parler de temps de charge pour recharger la batterie de 0% à 80%, par exemple.
Par exemple, dans le cas d'une Tesla Model 3, la puissance de charge est limitée à 125 kW sur un superchargeur de 2ème génération et elle atteint 250 kW sur un superchargeur de 3ème génération. Pourtant, le temps de charge n'est pas divisé par 2 d'un superchargeur à l'autre : la différence de temps entre les 2 chargeurs n'est "seulement" que de 6 minutes environ, soit 15%. Cette différence, plus faible qu'espérée, s'explique par le fait que la puissance de 250 kW n'est atteinte que sur une plage d'utilisation restreinte.
Recharge occasionnelle
Les prises P17 (bleues ou rouges) peuvent être des alternatives pour recharger occasionnellement un véhicule électrique. Les prises P17 bleues (courant alternatif monophasé) sont couramment utilisées dans les campings et les ports de plaisance. Les prises rouges (courant alternatif triphasé) sont plutôt utilisées dans le secteur industriel où des puissances plus importantes sont nécessaires.
Bien qu'elles soient conçues pour supporter des puissances élevées sur de longues périodes, ces prises ne sont pas reconnues par les normes françaises en tant que dispositif de charge habituel d'un véhicule électrique. Ce type de recharge s'apparente à une recharge de mode 2 et, à ce titre, il faut donc que le câble soit nécessairement équipé d'un dispositif de protection de la charge ICCB.
Tableau récapitulatif
Un grand merci à Fabian de La Pause Garage pour son partage d'expérience au sujet de la recharge à domicile !
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16 juin 2023 à 00h03
Bonjour Amathia,la puissance de charge dépendra de l'intensité disponible à votre point de charge : 16A (soit 3,7 kW en courant alternatif monophasé) ou 32A (soit 7,4 kW).
Dans le premier cas, il faudra environ 13 heures pour recharger la batterie de 20% à 100% (batterie de capacité 50 kWh) contre 6h30 dans le 2ème cas.
La section des câbles ne détermine pas la puissance de charge, mais elle est un facteur de sécurité : si le câble est trop long par rapport à la section des câbles, il y a un risque d'échauffement anormal pouvant conduire à un incendie du câble.